(Présentation faite au congrès CIEC d’Angers, le 22 avril 2011)
POURQUOI J’AI CHOISI DE DISPENSER CETTE FORMATION
- Parce que je savais que je pouvais vraiment apporter quelque chose aux gens qui viendraient me voir.
- Un pari : faire en sorte que ces « clients » obligatoires sortent de chez moi satisfaits, et éventuellement en ayant changé leur vision du chien.
- Un moyen de me faire connaître dans la région, et de diffuser les méthodes positives d’éducation.
COMMENT
- Soit en une journée, avec ou sans chien, au choix des clients ; soit en plusieurs cours, pour les propriétaires de jeunes chiens n’habitant pas trop loin.
- Je suis le programme imposé : Législation, Connaissances du chien (développement, communication, apprentissage, « fonctionnement »), Les différents types d’agression et leur prévention.
- J’insiste sur ce qui est le plus important à mon sens, c’est-à-dire, en résumé :
Un chiot équilibré, autocontrôlé (importance du choix de l’élevage !)
+ « Socialisation + Cadre + Activité »
+ Contrôle par le maître
= un chien qui ne peut pas être dangereux.
- Je délivre à chacun un document écrit : « Notions de base pour une relation harmonieuse entre le maître et son chien. »
- La partie pratique set déroule dans un jardin privé, clos de murs. Deux volets :
L’obéissance aux ordres simples : démonstration et pratique en éducation positive.
La rencontre entre congénères : mon propre chien, un fox-terrier, est systématiquement présent.
- Tarif : 80 € sans le chien, 100 € avec le chien. Ces prix s’entendent par foyer (et non par personne ou par chien !).
CHIFFRES
A ce jour : 28 journées de formation.
A des groupes de 1 à 14 personnes, auxquelles j’ai délivré 166 attestations d’aptitude.
Concernant 145 chiens : 7 Pitbulls, 42 Amstaffs, 96 Rottweilers.
OBSERVATIONS
- Absence des autres chiens de catégorie 1 (Boerbulls, Tosa sans papiers) et 2 (Tosa avec papiers).
- 2 types d’attitude chez les personnes présentes:
1/ Je suis là uniquement parce qu’on m’y oblige, mon chien est très bien comme il est, je n’apprendrai rien.
2/ Je me pose des questions et j’espère y trouver une solution : cette formation est bienvenue.
- A propos des chiens présents :
– Généralement, les gens qui ont emmené leur chien sont contents de l’avoir fait, ils y trouvent un bénéfice : l’observation par un professionnel du comportement de leur chien, et la correction éventuelle de leurs réactions face à leur chien.
– Pas forcément de correspondance avec l’évaluation vétérinaire : des chiens ne présentant aucun problème qui ont évalués en niveau 2, ou à l’inverse des chiens plus difficiles évalués en niveau 1.
– Rencontre contrôlée avec un chien inconnu : 2 personnes n’ont pas osé mettre leur chien (des Rottweilers) avec Bingo ; et un seul chien lui a vraiment fait peur (une Pitbull).
– Apprentissage d’une technique. J’ai été étonnée par le manque d’éducation de nombreux chiens.
- Propriétaires-type :
– Rott : famille, personnes d’âge mûr, habitant une propriété close.
Amstaff : jeune, habitant en ville.
– Absence du propriétaire-type sans doute visé par la loi : le loubard des cités qui terrorise le monde avec son chien.
– Je n’ai refusé à personne l’attestation d’aptitude.
- Réponses aux questions posées :
– Pourquoi avoir choisi un tel chien ? 2/3= un choix personnel assumé; 1/3= le choix de quelqu’un d’autre, hasard, cadeau, …
– Referiez-vous ce choix ? 10 % ne savent pas ; pour les 90 autres % : légère prévalence du oui sur le non. Ceux qui ne le referaient pas invoquent comme raison la loi et ses contraintes.
– Votre chien vous pose-t-il un problème d’ordre comportemental ? L’énorme majorité répond non ; mais cela ne correspond pas toujours à ce que je constate pour les chiens présents ! Et plusieurs mettent un bémol à cette satisfaction: le manque de sociabilité avec les autres chiens.
– Le chien a-t-il déjà été évalué par un vétérinaire ? A quel niveau ?
Sur 93 chiens déjà évalués: 52 sont en niveau 1 ; 40 en niveau 2 et un seul en niveau 3.
Les 52 autres n’ont pas encore passé l’évaluation, ou son résultat n’a pas été communiqué au propriétaire.
Le résultat dépend beaucoup du vétérinaire consulté : certains vétérinaires donnent facilement du niveau 1 lorsque le chien ne pose aucun problème, d’autres ont du mal à le faire. Les raisons invoquées pour mettre le chien en niveau 2 (ou 3) sont que le chien est peureux, qu’il a grogné, qu’il est douloureux, qu’il vit avec de jeunes enfants, qu’il n’est pas assez cadré par ses propriétaires, qu’il pèse plus de 20 kgs, qu’il n’est pas sociable avec ses congénères …ou tout simplement que c’est un Rott ou un Staff.
- La laisse et la muselière systématiques abîment la communication des chiens, surtout la communication visuelle avec ses congénères:
Un chien qui semble redoutable muselé peut se transformer en agneau dès qu’on le démusèle.
Le chien le plus équilibré, le plus sociable que j’aie vu dans mes formations est un Rott mâle castré de 7 ans, qui a vécu ses 2 premières années en toute liberté, en ville, sans laisse ni muselière, ce qui a d’ailleurs valu à son premier maître d’être condamné à s’en séparer.
- Personne n’est venu me contrôler !
- Je n’ai formé que 2 maîtres de chiens ayant mordu (2ème volet de la loi).
REFLEXIONS
- Dans un certain sens, la loi concernant les chiens de catégorie va atteindre son but : une diminution du nombre de ces chiens sur la voie publique. Mais elle ne parviendra pas à les supprimer : il restera toujours des amoureux de ces races.
- Il reste toujours aussi, apparemment, des amateurs de combats de chiens, qui continuent à les élever dans des conditions qui en font des bêtes féroces. Ceux-là ne viendront jamais dans nos formations, ils restent hors la loi. En somme, faute d’oser réprimer les vrais fauteurs de trouble dans les cités qui sont devenues des zones de non-droit, on préfère se donner bonne conscience en stigmatisant les « chiens de catégorie » et leurs propriétaires.
- Aspect positif: une prise de conscience par certains propriétaires du danger potentiel que présente leur chien, du fait de leur propre comportement. Cette formation forcée est pour ceux-là l’occasion d’apprendre beaucoup de choses. Certains en avaient vraiment besoin et n’auraient peut-être pas fait la démarche volontairement. Nous savons tous, en tant qu’éducateurs et comportementalistes, que bien souvent quand les propriétaires se réveillent, il est déjà très ou trop tard !
- Fait divers : En novembre dernier à Quimper, un Rottweiler a attaqué et blessé grièvement un homme dans la rue. Le journal a précisé que le chien était en règle, donc, logiquement, il avait été évalué et le maître formé. Toutes ces dispositions sont-elles réellement efficaces ?
- La muselière et la laisse obligatoires désocialisent ces chiens et les rendent, de ce fait, dangereux.
Désocialisation par rapport aux autres chiens : la communication étant abîmée par les outils (laisse et muselière) et les contraintes (interdictions diverses), les chiens désapprennent le « langage » canin, ce qui peut les rendre agressifs envers leurs congénères. Et c’est souvent en voulant séparer des chiens qui se battent qu’un humain se fait mordre.
Désocialisation par rapport aux humains : la muselière fait peur aux gens, qui hésitent à caresser ces chiens, ce qui n’est pas fait pour les rendre sociables ave tout le monde.
- En ce qui concerneles chiens ayant mordu, la loi n’est pas respectée : ignorance ou refus des propriétaires, et même des vétérinaires et des éducateurs. Il est en effet difficile et illogique de dénoncer en mairie (sachant la stigmatisation et les frais que cela entraînera pour eux) des gens responsables qui ont le bon réflexe, celui de venir nous voir pour faire en sorte que ça ne se produise plus !
PROPOSITIONS
- Les chiens qui ont été évalués en niveau 1 devraient être dispensés du port de la muselière.
- Il n’y a pas de raison valable pour que l’obligation de formation ne s’adresse qu’aux propriétaires de chiens de catégorie.
Cette loi doit être amendée dans le sens des propositions de l’appel des 15000. « Cette politique ne peut passer que par une information à tous les niveaux : au niveau des producteurs, pour la phase de socialisation du chiot ; des propriétaires des chiens, pour une bonne éducation du chien ; mais aussi des victimes potentielles que sont statistiquement principalement les enfants ; et enfin au niveau du public en général. »voir le site des 4C (Collectif contre la catégorisation des chiens)www.against-bsl.eu
- Au lieu d’être dispensée en une seule journée, elle est beaucoup plus profitable en plusieurs cours, dans le jeune âge, avec une séance de consolidation à la puberté.
- L’évaluation de dangerosité par le vétérinaire devrait avoir lieu après cette formation, après l’âge d’un an.
- La qualité des formateurs est essentielle : améliorer la formation des éducateurs.
- Les villes devraient toutes offrir aux propriétaires de chiens des espaces où faire courir et jouer leurs chiens en liberté, pour favoriser la sociabilité des chiens et leur intégration dans la ville.
- Lorsqu’un chien a mordu : la loi n’atteint pas son but, qui était de recenser les morsures.
Il vaudrait mieux imposer à chaque professionnel mis au courant d’une morsure de consigner cela dans un registre, anonyme, qu’il transmettrait une fois par an aux autorités compétentes. Le propriétaire accepterait mieux de payer quelqu’un qui va régler le problème plutôt qu’un vétérinaire qui ne va que le constater.